L'Autriche après l'Anschluss

Le 13 mars 1938, avec l’Anschluss, l’Autriche, rebaptisée Ostmark, est placée sous l’autorité du Gauleiter Josef Bürckel, doté du titre de Commissaire au rattachement de l’Autriche au Reich. 190 000 Juifs résident alors en Autriche où les persécutions à leur égard, en particulier à Vienne, deviennent alors plus importantes qu’en Allemagne : humiliations publiques, expropriations mieux organisées, émigration forcée plus rapide. Avant même l’entrée de la Wehrmacht sur le territoire et malgré les efforts des autorités pour la modérer, la violence se déchaîne : les rues sont le théâtre de scènes de violences et de brimades, des appartements et des commerces appartenant à des Juifs sont pillés. Les violences cessent le 29 avril, quand Bürckel menace de sanctionner les coupables.
Quelques jours après l’Anschluss, Himmler visite les carrières de Mauthausen, à 24 km de Linz et 145 km de Vienne. Les 300 premiers détenus, des prisonniers de droit commun autrichiens et allemands de Dachau, arrivent à Mauthausen le 8 août 1938.


L’accélération des persécutions

Après l’Anschluss en mars 1938, les mesures antijuives sont promulguées à une cadence redoublée. Le premier pas important dans ce processus est la loi du 28 mars abolissant le statut légal des communautés juives accordé au XIXe siècle. Parallèlement, les mesures d’aryanisation s’intensifient. La loi du 26 mars 1938 oblige tous les Juifs du Reich à déclarer la totalité de leur fortune aux autorités, sous peine de poursuites pénales. Au terme de l’article 7 de ce décret, Goering, responsable du Plan quadriennal, peut disposer des biens déclarés « conformément aux besoins de l’économie allemande ». D’avril à novembre 1938, les services du Reich prélèvent ainsi deux des sept milliards de marks de « biens juifs » déclarés.
 Les boutiquiers et les artisans reçoivent l’ordre de cesser toute activité commerciale avant le 1er janvier 1939. Enfin les exemptions en faveur des avocats et des anciens combattants juifs sont supprimées. En juillet 1938, les médecins juifs doivent demander des autorisations d’exercer et limiter leur pratique à une clientèle exclusivement juive. L’idée du marquage progresse avec l’obligation de porter sur les passeports, les prénoms Sara et Israël (18 août 1938). Début octobre 1938, la lettre « J » est apposée sur les pièces d'identité à l’instigation de la Suisse. Une série de rafles a lieu à Berlin durant l’été alors que les contrôles policiers se font plus fréquents. 1 500 Juifs sont internés dans des camps de concentration. Des destructions de biens, des expulsions de certains villages et la profanation de lieux de cultes ont également lieu. Les synagogues de Munich (9 juin), Nuremberg (10 août) et Dortmund (septembre) sont dynamitées.


Le sort des Juifs autrichiens

Le 20 août 1938, le Bureau central d’émigration juive est mis en place sous la responsabilité de Stahlecker, contrôlé en réalité par Eichmann lui-même. Il entreprend d’abord de refouler les Juifs par-delà les frontières en particulier en Tchécoslovaquie, en Hongrie et en Suisse. Selon des sources allemandes, environ 5 000 Juifs autrichiens sont chassés entre mars et novembre 1938. En octobre 1938, Himmler ordonne de regrouper à Vienne tous les Juifs des provinces autrichiennes. Durant l’été 1938, les Juifs autrichiens tentent de se réfugier illégalement dans les pays voisins et jusqu’au Royaume Uni. La Gestapo envoie plusieurs groupes de Juifs en Finlande, en Lituanie et aux Pays Bas d’où ils sont refoulés. Les protestations des pays étrangers se multiplient et l’entrée illégale ou l’expulsion vers l’Ouest deviennent plus difficiles. Moins de 6 mois après l’Anschluss, 45 000 Juifs autrichiens ont émigré. En mai 1939, plus de 100 000 Juifs, partent à leur tour, soit près de 50 % des Juifs autrichiens.

Foule saluant Adolf Hitler lors de l'Anschluss. Autriche, mars 1938.

Foule saluant Adolf Hitler lors de l'Anschluss. Autriche, mars 1938.
Crédit photographique : Mémorial de la Shoah/CDJC.

Scène d'humiliation à Vienne où des Juifs sont forcés de nettoyer le sol d'une rue. Vienne, Autriche, après mars 1938.

Scène d'humiliation à Vienne où des Juifs sont forcés de nettoyer le sol d'une rue. Vienne, Autriche, après mars 1938.
Crédit photographique : Mémorial de la Shoah/CDJC.

Camp de concentration de Dachau : des déportés construisent un nouveau camp S.S. à côté de l'usine de munitions. Allemagne, 28 juin 1938.

Camp de concentration de Dachau : des déportés construisent un nouveau camp S.S. à côté de l'usine de munitions. Allemagne, 28 juin 1938.
Crédit photographique : Mémorial de la Shoah/CDJC.