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Le ghetto de Varsovie

Après l’invasion nazie en septembre 1939, la Pologne est dépecée. L’Ouest et le Nord sont annexés par l’Allemagne, l’Est passe sous le contrôle soviétique tandis que la partie centrale du pays devient, sous le protectorat allemand, le «Gouvernement général ». Cette « réserve polonaise» regroupe 12 millions d’habitants, dont près d’un million et demi de Juifs. Dès octobre 1939, les petites communautés sont déportées vers les villes principales, où sont constitués des ghettos administrés par des conseils juifs (Judenräte).
En novembre 1940, tous les Juifs de Varsovie, soit 360 000 personnes environ, sont entassés dans un quartier ceinturé de murs, gardés par un triple cordon de police (allemande, polonaise, juive). Avec l’afflux constant de réfugiés, cet espace restreint compte, en 1941, près de 450 000 habitants malgré une mortalité effrayante. On recense plusieurs dizaines d’habitants par appartement et, par manque de place, en l’absence de tout moyen de subsistance, une foule erre en permanence dans les rues. Les Allemands planifient la pénurie, la disette, puis la famine, tout en employant plusieurs milliers de travailleurs forcés dans les usines et les ateliers qu’ils implantent dans le ghetto.

Dans ces conditions effroyables, la résistance tente de s’organiser. L’Entraide sociale juive (ZSS) organise de nombreuses soupes populaires. Le Centos (fondé en 1924), fédération des sociétés de protection des enfants et des orphelins, prend en charge l’aide aux enfants isolés. Des comités d’immeuble se constituent spontanément à partir de septembre 1939, et se fédèrent pour créer des cantines, collecter des vêtements, fournir une aide médicale. Les enseignants mettent en place des cours clandestins. Une faculté de médecine survit même jusqu’à l’été 1942. L’activité culturelle demeure intense. Des centaines d’acteurs, de musiciens et de peintres se produisent ou exposent aux domiciles privés ou dans les locaux de l’Entraide sociale. La presse clandestine gagne en ampleur jusqu’aux déportations de l’été 1942. Au printemps 1942, 47 titres sont recensés dont les deux tiers relèvent des mouvements de jeunesse des partis politiques. Les contributions traitent de la vie dans le ghetto, critiquent le Conseil juif et particulièrement la police.


L’occupant pratique dès les premiers jours une politique de terreur. Les coups, les bastonnades deviennent la règle. Toute sortie est passible de la peine de mort à partir d’octobre 1941. Durant le printemps 1942, chaque nuit, les SS entrent dans le ghetto pour y assassiner des victimes qu’elles laissent effondrées dans les rues, baignant dans leur sang. À l’automne 1941, les premières informations sur les exterminations massives perpétrées par les Einsatzgruppen opérant derrière le front russe, parviennent à Varsovie. Elles sont suivies de l’annonce du massacre de groupes entiers de la population juive dans des camps de concentration. Témoigner apparaît alors comme un impératif politique et un commandement moral, dont la nécessité se fait plus insistante au fur et à mesure que se précise l’éventualité de l’anéantissement.

La « grande déportation » ou Aktion débute le 22 juillet 1942 ; elle s’inscrit dans le cadre de l’Aktion Reinhardt qui a vu s’édifier les centres de mise à mort de Belzec (mars 1942), de Sobibor (mai 1942) et de Treblinka (juillet 1942). Les SS laissent à leurs supplétifs ukrainiens et baltes et à la police juive – chaque policier répondant sur sa tête d’un quota quotidien de cinq arrestations – la tache de bloquer les rues, de fouiller les immeubles et de rabattre la population vers l’Umschlagplatz, lieu de formation des convois. L’Aktion prend fin le 21 septembre, le jour de Yom Kippour. À Treblinka, 280 000 Juifs sont assassinés. Le ghetto n’est plus qu’un camp de travail où 36 000 Juifs survivent officiellement et où 20 à 25 000 clandestins se terrent. Son sursis tient d’une part à la pénurie de main-d’oeuvre, de l’autre à la nécessité d’une pause afin de recenser et d’expédier vers le Reich les biens volés.

Décimée et dépourvue de tout soutien, la résistance juive s’unifie néanmoins en un « Bloc antifasciste » et se dote d’une branche armée, l’Organisation juive de combat (OJC), fondée le 28 juillet 1942. Les premières opérations sont dirigées contre les responsables de la police juive. En janvier 1943, une seconde Aktion est interrompue face à la résistance et au fait que la population se cache dans un réseau souterrain creusé durant des mois. Himmler ordonne alors la liquidation du ghetto. Le 19 avril, les unités SS chargées de sa mise en oeuvre sont repoussées par moins d’un millier de combattants ne disposant que de quelques revolvers et grenades. Le commandant allemand est relevé de ses fonctions, le général SS Jürgen Stroop lui succède. Plus de 2 000 hommes, soutenus par de l‘artillerie et des blindés incendient maison après maison. Les Juifs sont asphyxiés, carbonisés, enterrés vivants dans les abris où ils sont retranchés. Le 16 mai 1943, Stroop fait dynamiter la grande synagogue. Il câble à Himmler : « Il n’existe plus de quartier juif à Varsovie. »



Carte du ghetto
© Institut historique juif de Varsovie

Le ghetto, le plus grand des “cimetières de vivants” (Emmanuel Ringelblum). ARG I/1305
© Institut historique juif de Varsovie

Prise de vue clandestine du passage en contrebande de sacs de farine par-dessus le mur du ghetto. ARG I/1307
© Institut historique juif de Varsovie

L'Umschlagplatz (lieu de regroupement des déportés) dans le ghetto de Varsovie, après une rafle. Pologne, juillet-août 1942, CXXVI_75.
© Coll. CDJC, courtesy of Institut historique juif de Varsovie.

Tracts de l’Organisation juive de combat (ZOB), avant le 18 janvier 1943. Traduits en polonais et en yiddish. ARG II/0333/A
© Institut historique juif de Varsovie